Vous êtes ici

Les betteraves fourragères à la rescousse

«Je ne voulais pas dépendre de l’extérieur en achetant des pulpes de betteraves », a expliqué Philippe Collin. (Crédit : A. HUMBERTCLAUDE)
«Je ne voulais pas dépendre de l’extérieur en achetant des pulpes de betteraves », a expliqué Philippe Collin. (Crédit : A. HUMBERTCLAUDE)

Pour s’adapter au nouveau cahier des charges du brie de Meaux, Philippe Collin, éleveur à Resson, a introduit la betterave fourragère dans son assolement et dans la ration de ses vaches laitières. Il a fait partager son expérience lors d’une rencontre avec d’autres éleveurs.

L’Union laitière de la Meuse a organisé une rencontre à l’Earl de la Croix Castel, à Resson le 10 novembre, en partenariat avec l’Organisme de défense et de gestion de l’AOP brie de Meaux. Un nouveau cahier des charges pour l’AOP a été adopté officiellement en juillet 2020, et les éleveurs laitiers situés dans la zone doivent s’y conformer pour continuer à fournir du lait pour la fabrication de ce fromage au lait cru.

« Une culture très exigeante »

Faute de pouvoir pratiquer le système pâturage, qui prévoit au moins 20 ares de pâture par vache traite, Philippe Collin a choisi le système avec co produits (dit briard). Parmi les composants figure la betterave fourragère, sous forme de pulpes ou entière. Dans une optique d’autonomie alimentaire, l'éleveur a opté pour la betterave entière, et a décidé d'en cultiver. « Je ne voulais pas dépendre de l’extérieur en achetant des pulpes de betteraves » a expliqué l’éleveur. Réticent au départ, sa participation à un groupe d’éleveurs animé par l’Union laitière de la Meuse,  qui partageaient la même préoccupation, l’a convaincu de se lancer.

En 2019, il a semé 3 ha de betteraves, et obtenu un rendement de 60 t/ha. En 2020, la culture a souffert de la sécheresse à l’automne, et le rendement est tombé à 25 t. Et cette année, Philippe Collin  a cultivé 5 ha, et espère une production d’environ 75 t/ha.

Désherbage « très important »

« C’est une culture très exigeante, différente du blé et du maïs » a expliqué l'agriculteur, qui s’est pris au jeu. Dans ce secteur aux sols argilocalcaires, il a fallu trouver une parcelle sans trop de cailloux, ni trop en pente, car l’arracheuse pourrait glisser lors de la récolte. Une bande de 12 m de large autour du champ est implantée avec une culture récoltée avant la betterave, en l'occurrence du maïs, afin de permettre le passage de la récolteuse et des remorques.

Pour le semis, la betterave a besoin d’une terre bien affinée.  Philippe Collin réalise un labour à l’automne pour bénéficier de l’effet du gel, puis un  passage de herse rotative au printemps. Le semis a été réalisé le 15 avril. « Le sol doit être bien réchauffé et bien ressuyé ; la densité -95 à 100.000 grains par ha-, ne doit pas être trop faible, pour éviter d’avoir de grosses betteraves difficiles à récolter », précise l’éleveur.  Il conseille aussi de ne pas mélanger les variétés, ce qui compliquerait l’effeuillage à la récolte. Cette année, la culture n’a pas souffert de parasites ; par contre le désherbage « est très important, car la culture n’aime pas la concurrence ; il faut bien détruire les repousses du précédent ». Un traitement au glyphosate a été réalisé juste après le semis, puis deux désherbages chimiques, et un binage.

Effet positif sur les taux

La récolte est réalisée par une entreprise ; « elle peut prendre du temps si les betteraves sont sales » commente Philippe Collin, qui conseille de démarrer autour du 15-20 octobre ;  le 5 novembre,  seule une petite partie était rentrée. Les conditions de récolte sont importantes. Il faut aussi éviter les périodes de fortes chaleurs, au risque d’une mauvaise conservation, encore accentuée si les tubercules sont sales ou ont été blessés à l’arrachage. « Nous conseillons de stocker les betteraves sous un bâtiment, ou de les mettre à l’abri au moins trois semaines avant distribution, afin que la terre sèche » explique Lionel Vivenot. Ceci afin d’éviter le risque de développement de pathogènes. Philippe Collin stocke ses betteraves dans un silo sous un bâtiment, sans bâche, « pour les laisser respirer », et sur une hauteur de 2 m maximum.  Dans de bonnes conditions, les betteraves se conservent pendant cinq à six mois.

20 kg de betteraves sont distribués par vache et par jour dans la ration, via le bol mélangeur, durant tout l’hiver et jusqu’à mi-avril. Si les laitières en sont très friandes, l'éleveur n’a pas constaté d’augmentation de production, mais un effet rapide sur les taux, qui ont progressé « d’au moins un point, soit un gain d’environ 10 € /1000 l ».